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A l'assaut du fort !

Une exposition immersive, "A l'assaut du fort !" du 12 juin au 2 novembre 2025, plonge les visiteurs au cœur des stratégies d'attaque et de défense médiévales, du fracas des couillards à l'avènement du canon. Une leçon d'histoire vivante, dans un lieu qui fut lui-même au centre de toutes les convoitises.

A l'assaut du fort !
14 Juin 2025 à 13h33 Par Mathilde Pallon

Comment prendre d'assaut une forteresse ? Et comment, depuis ses remparts, repousser l'ennemi ? Ces questions, qui ont décidé du sort des royaumes, trouvent un écho spectaculaire au Fort Saint-André. Jusqu'au 2 novembre, l'imposante citadelle qui toise Avignon et le Palais des Papes devient le théâtre d'une exposition passionnante sur l'art de la poliorcétique, ou l'art du siège. Loin d'un simple catalogue d'armes anciennes, le parcours propose une plongée dans l'ingéniosité, la brutalité et la stratégie qui ont façonné des siècles de conflits.

Au cœur de cette reconstitution, deux géants se font face : le couillard et le veuglaire. Le premier, héritier de la catapulte, est une machine de guerre redoutable, utilisée jusqu'au XVIe siècle. Manœuvrée par quatre à huit hommes, elle pouvait projeter à 180 mètres des boulets de pierre taillés sur place, dans l'urgence de la bataille. Un travail de force et de précision qui a fait trembler les plus hautes murailles. L'exposition raconte cette mécanique implacable, qui servit autant à attaquer qu'à défendre, comme ce fut le cas sur le Palais des Papes voisin.

Face à lui, le canon veuglaire symbolise une révolution. Né de l'invention de la poudre à canon en Chine au Xe siècle, il arrive en Europe après un long périple via les conquêtes mongoles et les croisades. La maîtrise du métal par les artisans européens transforme l'arme : les fûts de bambou laissent place à d'imposantes pièces de métal moulées, un véritable travail d'orfèvre. Mais la puissance a un prix. Le dosage de la poudre est un art périlleux, et nombreux sont les canons qui ont explosé, emportant leurs propres servants. De cette fragilité est née l'expression "faire les 400 coups", le nombre de tirs maximum qu'un canon pouvait endurer avant d'être refondu.

Une forteresse née d'un siège

Le choix du Fort Saint-André comme écrin de cette thématique n'a rien d'anodin. Sa genèse est intimement liée à l'un des sièges les plus marquants de la région. En 1226, le roi de France Louis VIII, en croisade contre les Cathares, trouve porte close à Avignon, qui soutient le comte de Toulouse. Furieux, le roi installe son camp sur la rive droite du Rhône, là même où s'élève aujourd'hui le fort, et pilonne la cité pendant trois mois à l'aide de ses couillards. La ville finit par se rendre, et la rive droite du Rhône, jusqu'alors entièrement terre d'Empire, devient partiellement française. C'est de cette victoire qu'est née l'idée d'une forteresse pour garder cette nouvelle frontière. Achevée en 1360, elle deviendra un verrou stratégique et un poste d'observation permanent sur Avignon.

Le parcours pédagogique de l'exposition détaille avec clarté le manuel du parfait assaillant et du défenseur aguerri. Pour l'attaque : le blocus pour affamer l'ennemi, la trahison pour ouvrir les portes de l'intérieur, l'échelade avec ses échelles assemblées à la hâte, ou encore la sape, cette technique consistant à creuser les fondations d'une muraille pour la faire s'effondrer après y avoir mis le feu. Un mot qui a donné naissance à nos "sapeurs-pompiers".

La défense, tout aussi ingénieuse, s'organisait autour des créneaux, des hourds puis des mâchicoulis pour faire pleuvoir pierres et projectiles sur l'assaillant. Les murailles, construites selon la technique de la "boutisse" pour une solidité maximale, et les entrées, protégées par un système de sas à double herse, complétaient le dispositif.

Du grand arc à l'arbalète, le destin du soldat

L'exposition met également en lumière le rôle important du soldat. On y découvre l'archer et son fameux arc long anglais, innovation majeure de la Guerre de Cent Ans, capable de décocher des flèches à 190 mètres. Mais aussi sa grande faiblesse : sa corde en boyau se détendait sous la pluie. Face à lui, l'arbalète gagne en popularité au XVe siècle. Nul besoin d'années d'entraînement pour la manier, et ses projectiles, les "carreaux", pouvaient percer les armures les plus robustes. Son efficacité fut telle que le Pape en interdit un temps la production, la jugeant trop déloyale et ne laissant pas au chevalier le temps de se confesser.

Au-delà de la seule période médiévale, l'exposition explore les guerres de Religion, où le fort servit de "citadelle de surveillance des Cévennes protestantes", et montre comment, à l'aube du XVIIIe siècle, des ingénieurs militaires inspirés par Vauban dessinèrent des plans pour le moderniser. Un pont est même jeté vers notre époque, rappelant que ce cadre a servi de décor à de nombreux tournages, de "Louis, enfant roi" à la série récente "The Serpent Queen".

En mêlant habilement l'histoire locale, la grande Histoire et la technique militaire, l'exposition du Fort Saint-André réussit son pari : transformer une visite patrimoniale en une aventure épique et instructive. On en ressort avec une nouvelle compréhension de ces murailles, non plus comme de simples pierres anciennes, mais comme les témoins vivants d'un passé où l'ingéniosité humaine se mesurait à l'aune de sa capacité à prendre ou à défendre un fort, une exposition à voir en famille !

POUR ALLER PLUS LOIN
Exposition : "A l'assaut du fort! L'art d’assiéger du Moyen age au XVIIe siècle"
Lieu : Fort Saint-André, Villeneuve-lès-Avignon.
Dates : Du 12 juin au 2 novembre 2025.
Tarif : compris dans le droit d'entrée (7 euros).
Gratuit pour les moins de 26 ans.
La parole à la commissaire : "Pourquoi les murailles du Fort Saint-André sont-elles si imposantes ? Comment et dans quel but menait-on un siège ? Le Fort Saint-André a-t-il été attaqué ? Cette exposition essaie de répondre à toutes ces questions que nous nous posons tous. Elle présente l'évolution de l'armement et par conséquent de l'architecture militaire, depuis le Moyen-Age jusqu'au XIXE siècle dans le contexte local du monument, durant la guerre de 100 ans puis pendant les guerres de religion” explique Bénédicte Soumille, co-commissaire de l'exposition.

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Article de : Mathilde Pallon
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