Marre du casse-tête des outils IA incompatibles ? Un nouveau protocole, le MCP, promet de jouer les chefs d'orchestre. Et c'est plus important qu'il n'y paraît.
Vous pensiez que la prochaine révolution de l'Intelligence Artificielle viendrait de modèles toujours plus gigantesques, capables de prédire la météo à Trifouilly-les-Oies ou d'écrire des poèmes à la manière de Baudelaire sous LSD ? Détrompez-vous ! La vraie disruption, celle qui change la donne en coulisses, est bien plus discrète, presque... ennuyeuse. Son petit nom ? MCP. Et croyez-nous, ce n'est pas parce que c'est technique que ce n'est pas passionnant.
Derrière cet acronyme un peu barbare se cache le Model Context Protocol. Lancé par la société Anthropic en novembre 2024, le MCP est une sorte de standard, une norme si vous préférez. Son but ? Uniformiser la manière dont les applications d'IA communiquent avec le monde extérieur, c’est-à-dire au-delà de leurs données d'entraînement initiales.
Pour faire simple, imaginez que les applications web utilisent des protocoles comme HTTP et REST pour papoter entre elles et avec les serveurs. Eh bien, MCP, c'est un peu la même idée, mais pour que les modèles d'IA puissent se connecter à différents outils (vos emails, votre agenda, vos logiciels de gestion de projet, etc.) sans avoir à réinventer la roue à chaque fois. C'est un peu comme si on avait enfin inventé une prise universelle pour toutes nos IA !
D'ailleurs, l'idée a vite séduit du beau monde : OpenAI, AWS, Azure, Microsoft Copilot Studio et, d'après nos informations, bientôt Google, seraient déjà de la partie. Des kits de développement (les fameux SDKs) sont même disponibles dans une flopée de langages : Python, TypeScript, Java, C#, Rust, Kotlin et Swift, sans compter les initiatives communautaires pour Go et d'autres.
Pour comprendre l'impact, prenons l'exemple de Lily, cheffe de produit dans une boîte d'infrastructure cloud, un cas cité dans le document que nous avons pu consulter. Lily, comme beaucoup d'entre nous, se noyait sous les notifications et les mises à jour provenant d'une demi-douzaine d'outils : Jira, Figma, GitHub, Slack, Gmail, Confluence... un vrai cauchemar pour rester organisée.
Dès 2024, elle avait flairé le potentiel des grands modèles de langage (les LLM, ces IA capables de comprendre et générer du texte) pour synthétiser toutes ces informations. Le hic ? Chaque modèle avait sa propre façon, bien à lui, de se connecter aux services. Un vrai casse-tête, qui la liait toujours plus à une seule plateforme. Et quand il a fallu intégrer les transcriptions d'un nouvel outil, Gong, rebelote : une connexion sur mesure, rendant encore plus ardu un éventuel changement de LLM.
Puis, MCP est arrivé. Aujourd'hui, Lily pilote tout via Claude (un modèle d'IA), connecté à ses applications professionnelles grâce à un serveur MCP local. Les rapports d'activité se rédigent quasi seuls, les synthèses pour la direction sont à portée de prompt. Et si un nouveau modèle d'IA plus performant émerge ? Pas de panique, elle peut l'adopter sans perdre toutes ses précieuses intégrations. Elle utilise même Cursor avec un modèle d'OpenAI et le même serveur MCP pour ses projets de code personnels. Son environnement de développement "comprend" déjà le produit sur lequel elle travaille. Magique ? Non, standardisé !
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L'histoire de Lily illustre une vérité simple : personne n'aime utiliser des outils fragmentés ou se sentir prisonnier d'un fournisseur. On veut tous la liberté d'utiliser les meilleurs outils, point barre. Et c'est là que MCP entre en jeu.
Mais attention, qui dit standard, dit aussi conséquences.
Premièrement, les fournisseurs de logiciels en tant que service (SaaS) qui n'ont pas d'API publiques solides pourraient bien se retrouver sur la touche. Les clients vont exiger la compatibilité MCP pour leurs IA.
Deuxièmement, attendez-vous à une accélération fulgurante des cycles de développement des applications IA. Plus besoin d'écrire des kilomètres de code personnalisé pour tester une idée ; les développeurs peuvent s'appuyer sur des serveurs MCP et des clients prêts à l'emploi comme Claude Desktop, Cursor ou Windsurf.
Troisièmement, les coûts pour changer de crèmerie (ou de modèle d'IA) vont s'effondrer. Puisque les intégrations sont découplées des modèles spécifiques, les entreprises pourront passer de Claude à OpenAI à Gemini – ou même mélanger les modèles – sans tout reconstruire.
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Bien sûr, tout n'est pas rose au pays des standards. MCP apporte son lot de défis.
La confiance est cruciale. Des dizaines d'annuaires MCP, proposant des milliers de serveurs maintenus par la communauté, ont vu le jour. Mais si vous ne contrôlez pas le serveur – ou la personne qui le contrôle – vous risquez de voir vos données sensibles se faire la malle. D'où l'importance, pour les entreprises SaaS, de fournir des serveurs officiels.
La qualité est aussi un enjeu. Les API évoluent, et un serveur MCP mal entretenu peut vite devenir obsolète, un peu comme un GPS qui vous enverrait dans un champ de patates. Il n'existe pas encore d'annuaire MCP faisant autorité, ce qui renforce le besoin de serveurs officiels et bien tenus à jour.
Attention aussi à la tentation du "méga-serveur MCP". Vouloir y fourrer trop d'outils augmente les coûts (en "jetons" de calcul consommés par l'IA) et risque surtout de noyer les modèles sous un déluge d'options. Un LLM peut vite être désorienté s'il a accès à trop d'outils. Le document suggère que des serveurs plus petits et spécialisés par tâche seront plus pertinents.
Enfin, les défis liés à l'autorisation et à l'identité persistent. Imaginez que Lily donne à Claude la permission d'envoyer des emails avec l'instruction bien intentionnée : "Envoie vite une mise à jour à Chris". Au lieu d'écrire à son chef, Chris, l'IA pourrait bombarder tous les "Chris" de son carnet d'adresses ! Pour les actions à fort enjeu, la supervision humaine reste donc de mise.
Le MCP n'est pas une simple hype passagère, mais, comme le souligne le document que nous avons exploré, un "changement fondamental dans l'infrastructure des applications IA". C'est une véritable dynamique auto-renforçante : chaque nouveau serveur, chaque nouvelle intégration, chaque nouvelle application amplifie le mouvement. De nouveaux outils et plateformes émergent déjà pour simplifier la création, le test, le déploiement et la découverte des serveurs MCP.
Les équipes qui embrasseront ce protocole "livreront des produits plus rapidement avec de meilleures histoires d'intégration". Quant aux retardataires, ils "devront se battre pour leur pertinence". Alors, prêts à prendre le train MCP en marche ?
Finalement, un peu d'ordre et de méthode dans le joyeux bazar de l'IA, ce n'est peut-être pas si "boring" que ça. Et si le vrai super-pouvoir, c'était de bien ranger sa chambre numérique ?
Auteur : Jérôme
Expert en développement web, référencement et en intelligence artificielle, mon expérience pratique dans la création de systèmes automatisés remonte à 2009. Aujourd'hui, en plus de rédiger des articles pour décrypter l'actualité et les enjeux de l'IA, je conçois des solutions sur mesure et j'interviens comme consultant et formateur pour une IA éthique, performante et responsable.