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Le musée Pierre de Luxembourg à Villeneuve-lès-Avignon

14 Octobre 2025 à 13h27

Vincent Pasquinelli - Vice-Président et Rédacteur

Je suis un passionné d'histoire, d'architecture et d'art vivant. J'exerce avec passion le métier de guide conférencier qui me permet de transmettre mes passions au plus grand nombre.

C’est un petit musée au cœur du petit centre historique de Villeneuve-lès-Avignon. On peut facilement passer à côté et ne pas le voir. Pourtant, ce musée regorge de chefs-d’œuvre uniques et incontournables.

Le musée Pierre de Luxembourg à Villeneuve-lès-Avignon

Histoire du bâtiment

Du palais cardinalice à l'hôtel particulier

L’histoire de ce bâtiment se confond avec celle de la ville. Au XIVe siècle, il appartient à la livrée cardinalice d’Arnaud de Via. Une livrée cardinalice est à l’époque les palais des cardinaux. Quand les papes s’installent de l’autre côté du fleuve à Avignon, les cardinaux se font construire des palais. N’ayant pas beaucoup de place, ils décident de traverser le fleuve pour se faire construire de très grands palais avec d’immenses jardins. Celle d’Arnaud de Via était comprise entre les rues de la République, du Camp de Bataille, de Montolivet et la voie ferrée. À sa mort, Arnaud de Via donna toutes ses possessions villeneuvoises à la collégiale qu’il a créée.

En 1387, un jeune homme viendra s’installer et mourra dans la partie qui est maintenant le musée. Son nom est Pierre de Luxembourg. Même s’il meurt à 18 ans, il mourra cardinal. Et on dit qu’il meurt en odeur de sainteté puisque son corps ne dégage aucune odeur. Il laissera son nom au musée. Malgré les nombreux miracles qui se réalisent autour de sa tombe (plus de 1950), il ne sera jamais canonisé mais seulement béatifié. Il sera trop lié à l’anti-pape Clément VII.

Le bâtiment sera abandonné au départ des papes, jusqu’au XVIIIe siècle où l’hôtel de Boucoiran va être construit sur cette partie de la livrée d’Arnaud de Via. C’est la façade que nous pouvons admirer aujourd’hui.

Un musée municipal

L’histoire du musée commence à la Révolution. Le 2 novembre 1789 l’Assemblée constituante déclare que les biens du clergé sont mis à la disposition de la Nation. Les 19 et 21 décembre, les décrets de mise en vente de ces biens sont publiés.

À Villeneuve-lès-Avignon, il y a trois grandes maisons religieuses : le monastère des Récollets, la Chartreuse du Val de Bénédiction et l’abbaye Saint-André. Les trois sont riches et possèdent de nombreuses œuvres d’art.

Avant de vendre les immeubles, ces dernières sont déplacées dans la collégiale qui deviendra un entrepôt. Après que Napoléon, alors premier consul, signe le concordat avec le pape Pie VII le 15 juillet 1801, la collégiale redevint une église paroissiale. Les œuvres d’art sont alors transférées dans l'hôpital.

Une pièce sera consacrée à l'exposition de certaines œuvres. Ce sera la naissance du musée municipal. Mais c’est en 1986 que le musée prend de l’importance avec le transfert des œuvres de l’hôpital vers l’hôtel de Boucoiran, classé monument historique en 1983.

Une collection exceptionnelle

Avec cette nouvelle affectation, les œuvres d’art sont enfin mises en valeur dans un écrin qui permet de dégager toute leur puissance et leur beauté. Le musée possède un ensemble de peintures du XVIIe siècle ainsi que des sculptures et un des tableaux les plus impressionnants de l’école d’Avignon.

Une collection de peintures diverses et riches

On ne s’attend pas à croiser autant de grands artistes dans un musée d’une petite ville comme Villeneuve-lès-Avignon. Pourtant, le musée possède une collection impressionnante avec des artistes de renom.

L’escalier d’honneur

Dès qu’on pousse la porte d’accès à l’étage, on arrive sur un bel escalier d’honneur fait au XVIIe siècle. Il faut lever les yeux pour admirer la peinture au plafond. Elle représente l'aumône de Pierre de Luxembourg, peinte par Léon Tessier en 1876.

Petite anecdote : le propriétaire du XIXe siècle de cet hôtel particulier a voulu rendre hommage à Pierre de Luxembourg. Problème : il est anticlérical. Comment rendre hommage à un saint homme sans rendre hommage à sa fonction ? En le représentant en habit laïc.

Les œuvres de Nicolas Mignard

Nicolas Mignard est très connu dans la région d’Avignon. Même s’il est né à Troyes, c’est l’amour pour Marguerite Apvril qui va le faire vivre à Avignon pendant 20 ans. Nous avons beaucoup de ses œuvres dans les musées et églises de la région. Il sera appelé par Mazarin en 1660 et chargé par Louis XIV de décorer plusieurs appartements du rez-de-chaussée des Tuileries. Il devient recteur de l’académie royale de peinture et de sculpture.

Le musée Pierre de Luxembourg possède six de ses œuvres dont Le Mariage mystique de sainte Catherine, Sainte Anne, la Vierge et un chartreux dans un paysage, Jésus au temple, L'Annonciation avec saint Charles Borromée, et L’extase de sainte Casarie.

Grâce à cette collection, on peut admirer le travail de Nicolas Mignard. Sa peinture est intense et réaliste. Un soin particulier est apporté aux visages. Son fils, Paul Mignard, deviendra un portraitiste réputé. Il tient cela de son père.

Les œuvres de Reynaud Levieux

Né à Nîmes en 1613, Reynaud Levieux perfectionne son art à Rome aux côtés de maîtres comme Nicolas Poussin, et certaines de ses toiles furent un temps attribuées à des noms célèbres. De retour en France, sa carrière décolle dans le Sud (Avignon, Aix-en-Provence), où il travaille pour les chartreux et décore des hôtels. Son œuvre la plus notable est le long cycle de Saint Jean-Baptiste pour la confrérie des Pénitents noirs d'Avignon. Après 1669, il s'installe à nouveau à Rome pour près de trente ans, où il meurt en 1699.

Une des œuvres les plus remarquables dans le musée est La Sainte Famille, qui représente Marie avec la douceur d’une mère aimante.

Les meubles de la chartreuse du Val de Bénédiction

Au dernier étage du musée, deux chefs-d’œuvre : la porte sculptée de l’église de la Chartreuse, un coffre, et surtout l’armoire de la sacristie qui renfermait le trésor du monastère chartreux. Cette armoire du XVIIe siècle est marquetée d’ivoire et de bois précieux.

Les deux œuvres phares du musée

Cette collection est déjà riche mais nous n’avons pas encore abordé les deux œuvres extraordinaires du musée : la Vierge à l’enfant en ivoire et le Couronnement de la Vierge.

La Vierge à l’enfant

La Vierge est en ivoire et date du début du XIVe siècle. Sculptée dans une défense d’éléphant, elle en épouse la courbure naturelle. Cette sculpture est un témoin du savoir-faire de luxe des ateliers parisiens de l’époque.

Le Couronnement de la Vierge

Quand Prosper Mérimée fait son tour de France pour classer les monuments historiques, il s'arrête à Villeneuve-lès-Avignon et fut saisi par la beauté du Couronnement de la Vierge. Ce tableau peint entre 1453 et 1454 se trouvait dans la chapelle de la Sainte Trinité de l’église de la Chartreuse du Val de Bénédiction.

Ce tableau est d’une complexité telle qu’il n’a pas pu être copié lorsque les amis du Louvre ont voulu l’acheter. Séparée de l'église par un mur, cette œuvre n'était pas destinée à l'enseignement du dogme mais à la méditation des chartreux, qui pouvaient s'identifier au personnage priant seul au pied de la Croix. Le thème principal est le salut de l'humanité grâce à l'intercession de la Vierge Marie. La Sainte Trinité y est représentée de manière particulière, avec le Père et le Fils en symétrie parfaite, couronnant la Vierge. Cette représentation théologique rappelle le décret d'union de 1439 pour la réconciliation des églises grecque et latine.

À elle seule, cette œuvre vaut la visite du musée Pierre de Luxembourg.

Informations pratiques

S’y rendre

Le musée se situe 3 rue de la République à Villeneuve-lès-Avignon.
En voiture : vous pouvez vous garer sur la place du marché sauf les jeudis et samedis matin.
En bus : arrêt office de tourisme, marche de 5 minutes.

Tarifs

Le prix d’entrée est de 5,5 € en tarif plein et de 4,5 € en tarif réduit. Gratuit pour les moins de 18 ans et les guides conférenciers. Possibilité d’acheter le pass monument à 20 € pour visiter les autres monuments de la ville.

La visite

La visite du musée est libre. Un ascenseur est prévu pour l’accessibilité mais il est actuellement en panne. Vous pouvez visiter du mardi au dimanche de 10h à 12h30 et de 14h à 18h. Compter 45 minutes pour apprécier toutes les œuvres.

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Article de : Vincent P.
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