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Lina Lamara et Nicolas Taffin : Voyage à Napoli, l'amour à l'épreuve du désir

Au cœur du Festival Off d'Avignon, la pièce Voyage à Napoli, écrite par Lina Lamara, se penche sur la complexité des sentiments au sein du couple. Adil et Lulu, après treize ans de vie commune, décident d'ouvrir leur relation pour raviver une flamme vacillante. Une expérience qui va bousculer leurs certitudes et les confronter à leurs désirs profonds. Nous avons rencontré Lina Lamara et Nicolas Taffin, pour discuter de cette comédie romantique moderne qui se joue au théâtre Le 3S - Le Sept.

9 Juillet 2025 à 19h24 Par Mathilde Pallon

Avignon et Moi : Pour commencer, de quoi parle la pièce Voyage à Napoli ?

Lina Lamara : C'est l'histoire d'Adil et Lulu, en couple depuis treize ans. Lulu rêve de nouveauté, de nouveaux horizons, et aspire notamment à partir vivre à Naples. Tout ce qui peut permettre de changer le quotidien, elle est preneuse. Adil, au contraire, est très bien comme ça ; plus la stabilité est installée, mieux il se porte. Face à cette situation, elle va lui proposer d'entrer dans une relation dite ouverte afin d'explorer de nouvelles choses. Mais ce jeu n'est pas sans conséquences : il va réveiller des douleurs, des désirs enfouis, et peut-être les forcer à se poser les vraies questions sur ce qui se passe réellement entre eux. C'est une histoire sur la complexité des sentiments et sur cette interrogation : pourquoi, même lorsque l'on a tout pour être heureux, cela ne suffit-il parfois pas ?

En tant qu'autrice, comment l'inspiration pour ce sujet vous est-elle venue ?

Lina Lamara : Je suis passionnée par l'écriture et je voulais m'attaquer au genre de la comédie romantique. Plus sérieusement, j'étais vraiment tombée amoureuse de la ville de Naples, que j'ai trouvée brûlante et volcanique, ce qui m'a fait réfléchir à l'amour que l'on croit être une chose tranquille. Cela m'a amenée à vouloir comprendre ce qui se passe en nous et pourquoi l'on n'arrive parfois pas à être heureux en couple. Je suis aussi passionnée par le cinéma et j'aspirais à écrire quelque chose qui arrache le ventre, dans la veine de Sur la route de Madison ou des films de Fellini et Bergman.

Nicolas Taffin, qu'est-ce qui vous a séduit dans ce texte pour vous engager ?

Nicolas Taffin : Tout s'est fait très vite. Notre rencontre avec Lina, par l'intermédiaire de Stéphane Titeca qui co-signe également la mise en scène, a été décisive. En lisant la pièce, j'ai tout de suite aimé sa modernité et l'audace du sujet. Parler d'amour a déjà été fait de nombreuses fois, mais sous cet angle, je ne l'avais jamais vu. Il y a aussi le plaisir égoïste du comédien à défendre une belle partition. Sur le plateau, ils ne sont que deux, il n'y a pas de bulles d'air. C'est une comédie romantique, ou une "dramédie" comme certains pourraient la qualifier, qui offre une large palette de jeu : il y a des moments drôles, touchants, plus solennels. Pour un comédien, un rôle qui n'est pas linéaire est ce qu'il y a de mieux.

Avez-vous rencontré des défis particuliers dans la création du spectacle ?

Lina Lamara : Oui, il y a quelque chose de très organique dans cette pièce. Le principal défi était d'atteindre la plus grande authenticité possible dans le jeu, pour que le public ait l'impression de regarder la vie de ces personnages par le trou de la serrure. Nous voulions aussi apporter une rythmique et une lumière qui rappellent l'étalonnage au cinéma, pour guider le regard comme le ferait une caméra.

Nicolas Taffin : Un autre défi était de casser les codes du théâtre. Nous n'utilisons jamais les coulisses, les comédiens ne sortent jamais du plateau. Cela demande un grand travail sur la mise en scène, notamment sur la fluidité des transitions, pour que le rendu soit presque cinématographique et que le spectateur ne soit pas dérouté par les changements de scènes. Nous avons eu la chance de la jouer dans des salles de tailles différentes et de voir que ce parti pris fonctionnait.

Si vous deviez résumer la pièce en quelques mots, quels seraient-ils ?

Lina Lamara : Je dirais passion, sensualité... et gourmandise. Cette pièce est comme un plat de pâtes, il y a quelque chose de très gourmand.

Nicolas Taffin : J'ajouterais liberté. Il y a une véritable quête de liberté chez le personnage de Lulu, et Adil doit courir après cela, repousser les murs dans sa propre tête pour la suivre.

Quel message ou quelle émotion souhaitez-vous transmettre au public ?

Nicolas Taffin : Je pense que chacun repart avec ce qu'il veut. Quand on raconte une histoire d'amour, elle fait forcément écho en chacun, mais pour des raisons différentes : le passé, les aspirations, les fantasmes... Il ne faut pas chercher à imposer une transmission, mais plutôt espérer que le spectateur récupère quelque chose pour lui-même. En amour, on a toujours quelque chose à récupérer si la pièce est bien écrite et bien jouée.

Lina Lamara : J'avais adoré la réaction d'un couple assez âgé lors d'une sortie de résidence. Ils sont sortis de la salle en se tenant la main, et nous ont dit : “Vous nous avez donné envie de nous aimer follement”. Quand je regarde moi-même des films comme Love Actually, moi aussi ça me donne envie d'aimer. Peut-être que le message est là : donner envie.

Pour conclure, Voyage à Napoli, c'est donc...

Lina Lamara : C'est une heure et dix minutes de fougue, de désir, de passion, mais aussi de maladresse, de chaos et de disputes. C'est la vie, avec cette touche de magie que l'on vient chercher au théâtre pour nous sortir de notre propre condition.

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