Dans Le Roi se meurt, la fin est annoncée dès le début : le roi va mourir. Mais ce qui pourrait être tragédie devient ici un théâtre de l’absurde vibrant, drôle, poignant et étrangement familier. Cette réinvention décalée du texte de Ionesco, baignée d’esthétique sixties et d’un humour grinçant, transforme la peur de la mort en spectacle pop et troublant. Un royaume en ruine, un pouvoir qui s’effrite, des personnages fantasques... Et un public, y compris les enfants, suspendu à cette fable universelle et folle sur la finitude. Une mise en scène inventive et des comédiens habités pour une œuvre hors du temps.
Cette version de Le Roi se meurt explose les carcans du théâtre classique pour mieux plonger dans l’absurde coloré d’un univers sixties délicieusement déglingué. Fidèle à l’esprit d’Ionesco, la mise en scène joue à fond la carte du décalage : costumes flamboyants, décors télévisuels rétro, personnages burlesques... On assiste autant à un effondrement royal qu’à une lente fissuration de l’ego, du corps, du monde.
Le roi, orgueilleux, terrifié, incapable d’accepter sa fin, incarne notre propre déni collectif de la mort. Son royaume se désagrège à vue d’œil, métaphore limpide d’un monde où plus rien ne tient, pas même l’autorité. Une fissure scénique, à la fois concrète et symbolique, apparaît peu à peu, illustrant la décomposition du pouvoir, du temps, de la vie elle-même.
L’humour est omniprésent, mais jamais gratuit. Il sert à mieux faire entendre l’angoisse. Le texte, même si le spectateur n’en connaît pas les origines, reste limpide grâce à une mise en jeu dynamique, qui capte l’attention de tous – y compris des enfants, fascinés par ce cortège étrange.
Les comédiens livrent de très belles prestations, oscillant entre burlesque et profondeur. La farce côtoie l’émotion, la mort s’invite sans solennité mais avec une lucidité mordante. On sort de ce spectacle à la fois allégé et questionné : peut-on rire de notre fin inéluctable ? Oui, et c’est précisément ce que fait ce Roi se meurt, avec brio.
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