ChatGPT, nouveau coach amoureux : la machine peut-elle décrypter nos sentiments ?

De plus en plus de personnes se tournent vers les intelligences artificielles génératives pour analyser leurs relations amoureuses. Une solution miracle ou un pansement sur une jambe de bois numérique ?

Vous est-il déjà arrivé de fixer un message de votre moitié (ou ex-moitié) en vous demandant frénétiquement : « Mais qu’est-ce que ça veut dire, au juste ? ». Si oui, sachez que vous n'êtes plus seul(e) à chercher des réponses... auprès de ChatGPT. Oui, vous avez bien lu. L'intelligence artificielle générative, cette technologie capable de créer du contenu original après avoir ingurgité des montagnes de données, s'invite désormais dans l'arène la plus intime qui soit : nos relations interpersonnelles. Alors, l'IA, nouveau gourou de l'amour 2.0 ? Plongeons dans les méandres de nos cœurs... et de nos « prompts ».

Mon ex, ChatGPT et moi

L'histoire de Green, un New-Yorkais de 29 ans, a de quoi laisser songeur. En pleine rupture, quelle ne fut pas sa surprise de recevoir un email de son ex. Un message qui se voulait, selon son expéditeur, ni offensant ni méchant. La preuve ? Il avait été « passé plusieurs fois dans ChatGPT pour s'assurer qu'il ne blesserait personne », raconte Green. Une démarche qui l'a d'abord amusé, puis contrarié. « J'ai été sidéré qu'une relation aussi personnelle et attentionnée soit réduite à l'opinion de ChatGPT », confie-t-il, soulignant que l'IA n'a aucune connaissance du contexte ou de l'historique de leur relation. Un sentiment d'impersonnalité qui en dit long.

ChatGPT, ce confident un peu trop zélé

Si Green a subi l'utilisation de ChatGPT par un tiers, d'autres, comme Kate, une habitante de Denver âgée de 35 ans, l'utilisent de leur plein gré pour décortiquer leurs propres relations. Depuis environ deux mois et demi, elle soumet ses échanges de textos à l'IA. « Je lui ai demandé d'analyser nos échanges de messages et de me donner un bilan », explique-t-elle, évoquant notamment une relation naissante source d'anxiété. Style d'attachement, aspects sains de la relation, et la question qui tue : qui aime qui le plus ?

Les réponses de ChatGPT peuvent être « éclairantes », au point que Kate les partage avec ses amies. Mais elle admet que cela peut aussi nourrir son anxiété, l'IA pouvant émettre des hypothèses sur le comportement de son partenaire (suggérant qu'il prend ses distances alors qu'il est simplement occupé) qui la font passer des heures à rédiger de nouvelles requêtes (« prompts »). Sa thérapeute, la vraie, n'est d'ailleurs pas fan : « Kate, promettez-moi de ne plus jamais refaire ça », lui a-t-elle lancé.

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L'IA a-t-elle un cœur (ou juste un algorithme) ?

Pourquoi cet engouement à confier nos états d'âme à une machine ? Pour Kate, ChatGPT est une oreille attentive sans jugement, sans emploi du temps ni problèmes personnels. « Si j'envoyais autant de messages à mes amis que je fais de requêtes à ChatGPT, je ferais exploser leur téléphone », admet-elle. Andrew, 36 ans, vivant à Seattle, partage ce sentiment. Après une rupture par SMS au message ambigu, son premier réflexe a été de demander à ChatGPT : « Est-ce qu'elle a rompu avec moi ? ». L'IA, aussi perplexe que lui, lui a au moins offert une forme de validation sans avoir à « ennuyer ses amis avec [ses] lamentations ».

Pourtant, comme le souligne Daniel Kimmel, psychiatre clinicien à l'Université de Columbia, il y a un risque à déléguer ce « travail émotionnel » à une IA. « Nos amitiés dépendent de ces liens », explique-t-il, rappelant que les humains ont passé des centaines de milliers d'années à développer leur propre « simulateur émotionnel ». L'IA, elle, ne possède pas cette expérience. Son atout ? Un « moteur prédictif extrêmement puissant » qui interprète les mots. « C'est là que réside la limite de l'IA : elle ne peut opérer que sur des mots », précise Kimmel. Ce qui échappe à la machine, c'est tout « ce qui n'est pas des mots », cette part « ineffable » de nos interactions.

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Mon journal intime s'appelle ChatGPT : et la vie privée ?

Cette pratique soulève une question épineuse : la confidentialité. Fournir des détails aussi intimes à ChatGPT, n'est-ce pas risqué ? Kate y a pensé : « Oh mon Dieu, si quelqu'un voyait juste mon historique de prompts – on pourrait tirer des conclusions folles sur qui vous êtes ». Andrew, lui, parle d'un « accord de confiance optimiste » avec la plateforme, la trouvant parfois plus fiable que des humains qui pourraient transformer ses confessions en monnaie d'échange.

Du côté d'OpenAI, la société derrière ChatGPT, une porte-parole, Taya Christianson, a indiqué à WIRED que l'outil est conçu pour être factuel, neutre et axé sur la sécurité, mais qu'il ne remplace pas un professionnel de la santé mentale.

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L'amour à l'heure du prompt, entre fascination et frissons

L'irruption de ChatGPT dans nos jardins secrets amoureux est un phénomène fascinant. D'un côté, un outil perçu comme un confident disponible et sans jugement, capable d'apporter un éclairage "objectif" sur des situations complexes. De l'autre, une machine dépourvue de contexte émotionnel réel, susceptible d'augmenter l'anxiété et posant de sérieuses questions de confidentialité. Si certains utilisateurs, comme Kate, tentent de réduire leur usage sur les conseils de leur thérapeute, la tendance de fond semble bien installée, alimentée par des créateurs de contenu sur TikTok qui partagent astuces et prompts pour analyser disputes ou obtenir des conseils amoureux.

Alors, ChatGPT, futur conseiller matrimonial ou simple gadget pour cœurs en émoi ? Une chose est sûre : pour les nuances subtiles d'un « je t'aime » ou la chaleur d'une étreinte, l'intelligence humaine a encore de beaux jours devant elle. Et c'est peut-être tant mieux, non ?